Porca Miseria
"Les mots français que j'entends ma mère prononcer le plus souvent sont cholestérol et contrariété. Je m'étonne qu'une femme ayant tant de mal à a.. Lire la suite
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"Les mots français que j'entends ma mère prononcer le plus souvent sont
cholestérol et contrariété. Je m'étonne qu'une femme ayant tant de mal à
amadouer sa langue d'adoption puisse connaître deux termes selon moi si
savants. Contrariété l'emporte de loin. Elle finit par se l'approprier
comme s'il la débarrassait du devoir d'aller mieux, et qu'une fois
prononcé, rien ne l'obligeait à développer, tout était dit, contrariété.
Les soirs où l'affrontement avec son mari devient inévitable, elle
assène le mot ruine, en italien, c'est la note la plus aiguë de son
lamento, la rouiiiina, dont le sens est sans équivoque : c'est
l'émigration, le départ maudit, la faute originelle, la source de tous
ses maux, la contrariété suprême". En 1954, la famille Benacquista
quitte l'Italie pour s'installer en banlieue parisienne. Les parents,
Cesare et Elena, connaîtront le sort des déracinés.
Dans ce
bouleversant récit des origines, leur petit dernier, Tonino, restitue
avec fantaisie cette geste. Il raconte aussi les batailles qui ont
jalonné sa conquête de la langue française. Avec Porca miseria, Tonino
Benacquista trace la lumineuse trajectoire d'un autodidacte que
l'écriture a sauvé des affres du réel.