Oeuvres complètes T3 -Beau Livre Journaux et lettres 1897-1914
Faut-il le rappeler ? Les textes ici réunis n'étaient pas destinés à la publication, et Kafka eut soin de le faire savoir à son ami Max Brod : "to.. Lire la suite
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Faut-il le rappeler ? Les textes ici réunis n'étaient pas destinés à la
publication, et Kafka eut soin de le faire savoir à son ami Max Brod :
"tout ce qui se trouve dans ce que je laisse derrière moi [... ] en fait
de journaux, manuscrits, lettres, écrites par d'autres ou par moi,
dessins, etc. , est à brûler sans restriction et sans être lu". Brod
divulgua pourtant ces documents, progressivement et partiellement.
Son
geste passa tantôt pour une trahison, tantôt pour le signe tangible
d'une fidélité vraie. Il reste, quoi qu'on en pense, que ces écrits dits
"intimes" enrichissent la voix de Kafka et contribuent à faire d'elle
l'une des plus singulières qui soient. Dans le sillage de ses romans,
tous les écrits de Kafka ont peu à peu acquis un statut "littéraire".
D'une centaine de fiches numérotées on a fait le recueil des Aphorismes
de Zürau, parfois intitulé Considérations sur le péché, la souffrance,
l'espérance et la vraie voie.
La Lettre au père, nouvelle
"description d'un combat", fut un temps promise à l'envoi postal, mais
se lit aujourd'hui comme un texte autonome, et comme l'une des clés de
l'oeuvre : Kafka déclara plusieurs fois son intention d'en confier le
manuscrit à Milena Pollak afin de lui donner accès à une compréhension
plus profonde de sa difficulté à vivre et à aimer - difficulté dont les
lettres à Felice Bauer témoignent massivement.
Ces lettres à Felice
et les lettres à Milena (on a eu tôt fait de réduire ces jeunes femmes à
leur prénom) ont été considérées comme de grands romans d'amour. Leur
quantité, leur tonalité, la puissance des affects présidant à leur
écriture les destinaient à une existence littéraire propre. Elles
démontraient la violence chez Kafka du désir de vivre pour et par
l'écriture, contre les voeux du père.
Quant au Journal, il bénéficie
d'une forte image d'"oeuvre pour soi ". Il fut pour son auteur un lieu
de vie et de survie solitaire dans les profondeurs protectrices de
l'écriture, un réseau souterrain de stockage sans cesse ouvert sur des
galeries nouvelles - un terrier. Très hétérogènes, les cahiers de
Journal servaient à consigner des notes personnelles et des récits de
rêves, mais aussi à recueillir des chapitres de romans ou des ébauches
de récits, à rédiger des brouillons de lettres, à accueillir des dessins
et des exercices d'écriture.
Ils sont ici traduits intégralement.
Les nouvelles et récits contenus dans ces cahiers, et que l'on avait
isolés pour les publier au tome I de cette édition, figurent donc de
nouveau au sein du Journal, sous une autre lumière. Le corpus intégral
des lettres de Kafka, dont quelques-unes étaient encore inédites en
français, est ici classé selon la chronologie, et non plus, comme
autrefois, par correspondants.
C'est l'occasion d'une redécouverte -
l'occasion aussi de prendre conscience de l'intrication des notes
personnelles ou intimes, des projets littéraires et des lettres
quotidiennes. Chaque tome contient en effet les Journaux de la période