Aurore
Avec ce livre commence ma campagne contre la morale. Non point que l'on y sente le moins du monde l'odeur de la poudre. On lui trouvera, au contra.. Lire la suite
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Avec ce livre commence ma campagne contre la morale. Non point que l'on y
sente le moins du monde l'odeur de la poudre. On lui trouvera, au
contraire, de tous autres senteurs, un parfum bien plus agréable, pour
peu que l'on ait quelque délicatesse de flair. Il n'y a pas là de fracas
d'artillerie, par même de feu de tirailleurs. Si l'effet de ce livre
est négatif, ses procédés ne le sont en aucune façon, et de ces procédés
l'effet se dégage comme un résultat logique, mais non pas avec la
logique brutale d'un coup de canon.
On sort de la lecture de ce
livre avec une défiance ombrageuse à l'endroit de tout ce que l'on a
adoré jusqu'à présent sous le nom de morale. [...]La question de
l'origine des valeurs est pour moi une question de tout premier ordre,
parce que l'avenir de l'humanité en dépend.
Friedrich Nietzsche.
Publié d'abord en 1881, puis à nouveau en 1887, et précédé d'un
avant-propos de Nietzsche lui-même, Aurore s'attaque de plein fouet au
problème de la morale, en mettant en œuvre la méthode généalogique.
Nietzsche
traque le moment de surgissement des " préjugés moraux ", parce qu'il
faut découvrir les raisons qui ont conduit l'homme à s'inventer un
système contraignant de pratiques morales, capable de devenir, ensuite,
comme " une seconde nature ". Sans avoir la virulence extrême des écrits
ultérieurs, Aurore résonne néanmoins d'accents polémiques vengeurs :
Platon et Schopenhauer à nouveau dans la ligne de mire.
L'un, parce
qu'il dévalorise la culture des sophistes, dont Nietzsche se fait le
chantre ; l'autre parce qu'il a cultivé la doctrine de la compassion, un
sentiment que Nietzsche juge être une " affection nocive ".
Révision de la traduction, notes et commentaires par Angèle
Kremer-Marietti.